Peines Sans Gravité ?
« De deux choses l’une : soit le PSG gagnera et ce sera le chaos, avec des violences, pillages et destructions, de la part de supporters fêtant la victoire. Soit le PSG perdra et ce sera le même chaos, de la part des mêmes supporters, déçus de la défaite ».
Ce qui se voulait une boutade d’humour noir et grinçant, constitue hélas, la triste réalité.
Mardi, le PSG a gagné, et il y a eu des violences contre les forces de l’ordre, des pillages et des dégradations (y compris par incendie).
Dimanche, le PSG a perdu, et il y a eu des violences contre les forces de l’ordre, des pillages et des dégradations (y compris par incendie).
Il ne s’agit pas d’un fait propre au Paris-Saint-Germain et aux supporters de football. Force est de constater, désormais, que tout rassemblement, quelle qu’en soit la cause, est susceptible de drainer une faune n’ayant que faire de la cause, sportive ou politique, objet de la manifestation, mais qui ne viennent que pour détruire, piller, casser, et surtout, jouer à la guérilla urbaine avec les Forces de l’Ordre.
Cela, que ce soit pour des raisons idéologiques, comme les « black blocks » adeptes de l’anarchie et qui ciblent les banques et les lieux de pouvoir. Ou pour des raisons de basse crapulerie, comme ces « bandes » descendues « faire leurs courses » dans les magasins de vêtements, d’accessoires moto, ou les bijouteries des Champs-Elysées. Avec bien entendu, pour dénominateur commun, la volonté de « casser du flic ».
Ce qui interpelle (c’est le cas de l’écrire !) en l’occurrence est le caractère quasi-inéluctable de ces délits. L’annonce dans tous les média, du déploiement de forces de police en nombre, de la multiplication des contrôles, ou de consignes d’extrême réactivité, n’a aucun effet dissuasif sur les fauteurs de troubles.
Sans doute faut-il en trouver une explication, dans l’absence de crainte de la sanction.
Car pour que la dissuasion fonctionne, il faut qu’il y ait certitude -donc crainte-, en bout de chaîne, d’une sanction pénale, et d’une sanction sévère. A défaut, pourquoi se priver, vu que l’on ne « risque » rien ou presque ?
Nous disposons pourtant d’un arsenal législatif suffisant. Mais à quoi bon disposer d’un outil si c’est pour ne pas, ou trop peu, l’utiliser ?
Le Code Pénal prévoit en effet :
- Pour les violences sur un fonctionnaire de la police nationale ou un militaire de la gendarmerie nationale dans l’exercice de ses fonctions, sa qualité étant apparente ou connue de l’auteur :
- Une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende si les violences ont entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours (Code pénal, article 222-12) ; et même sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende quand, en sus, les faits sont commis par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice. Pour peu que la préméditation soit retenue (par exemple, pour l’auteur de violences qui comme par hasard se baladait avec un marteau dans la poche), les peines sont portées à dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende.
- Une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende pour les violences dites « légères », n’ayant entraîné aucune incapacité de travail ou inférieure ou égale à huit jours (Code pénal, article 222-13) ; peine portée à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende lorsque cette infraction est commise dans deux circonstances (par exemple, sur policier ou gendarme + en réunion) voire sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende pour les faits commis dans trois circonstances (sur policier ou gendarme + en réunion + avec préméditation).
Avez-vous déjà eu connaissance de peines prononcées à ces hauteurs ?
Certains magistrats semblent trouver presque « normal » que les policiers et gendarmes s’en prennent « plein la gueule » lors de ces émeutes urbaines. « ce sont les risques du métier ». La mansuétude dans les condamnations vient alors traduire cette conception idéologique.
Mais le métier d’un policier, c’est de garantir l’ordre républicain, la paix publique, pas de se prendre des projectiles, parfois incendiaires ! Pas de servir de défouloir, de cible, de punching-ball, à des hordes violentes et haineuses !
Et celui qui agresse un policier, c’est à la communauté nationale dans son ensemble, au corps social, auquel il porte atteinte.
La réponse se doit dès lors d’être équivalente à la gravité de l’atteinte.
A défaut, la Justice et les forces de l’Ordre y perdent en crédibilité. Si la réponse pénale est faible, pourquoi se priver de courir le risque ? Il n’y a presque rien à craindre. Une admonestation, un petit sursis, et dans les cas les plus graves, une peine de prison faible, donc aménageable sous forme de bracelet électronique ou « convertible » en jours-amende…
Je ne compte plus le nombre de « clients » en garde à vue, à qui j’estime utile de rappeler les peines encourues, et qui me rient au nez : « c’est la théorie ça >Maître ! J’aurai jamais autant ! »
- Pour le vol en réunion commis par effraction, et précédé, accompagné ou suivi de destruction, dégradation ou de détérioration : dix ans d’emprisonnement, 150 000 euros d’amende. (Code pénal, article 222-14).
S’il est considéré comme commis en bande organisée, la peine encourue passe à quinze ans de réclusion criminelle (il s’agit donc d’un crime, passible des Assises) et de 150 000 euros d’amende. Vingt ans lorsqu’il est précédé, accompagné ou suivi de violences sur autrui. (Code pénal, article 311-9)
- Pour la destruction, la dégradation ou la détérioration d’un bien appartenant à autrui : celle-ci est punie de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende, sauf s’il n’en est résulté qu’un dommage léger. (Code pénal, article 322-1)
La peine encourue passe à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende lorsque le bien détruit, dégradé ou détérioré, est destiné à l’utilité ou à la décoration publiques et appartient à une personne publique ou chargée d’une mission de service public. (mobilier urbain, fourgon de CRS par exemple). (Code pénal, article 322-2)
Peines portées à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende lorsqu’elle est commise par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice. (Code pénal, article 322-3)
En cas de destruction, dégradation ou détérioration d’un bien appartenant à autrui par l’effet d’un incendie ou tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes, les peines sont de dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende (Code pénal, article 322-6). Peine qui monte à quinze ans de réclusion criminelle (un crime, donc) et 150 000 euros d’amende lorsqu’elle a entraîné pour autrui, une incapacité de travail pendant huit-jours au plus. C’est le cas du pompier blessé légèrement en éteignant l’incendie de poubelle ou de voiture… Et si les blessures occasionnent plus de huit jours d’arrêt de travail, ou que la bande organisée est retenue, l’on passe à 20 ans de réclusion criminelle…théoriquement !
- Pour l’attroupement : Constitue un attroupement tout rassemblement de personnes sur la voie publique ou dans un lieu public susceptible de troubler l’ordre public.
Un attroupement peut être dissipé par la force publique après deux sommations de se disperser demeurées sans effet, adressées par le préfet, le sous-préfet, le maire ou l’un de ses adjoints, tout officier de police judiciaire responsable de la sécurité publique, ou tout autre officier de police judiciaire, porteurs des insignes de leur fonction.
Il est procédé à ces sommations suivant des modalités propres à informer les personnes participant à l’attroupement de l’obligation de se disperser sans délai ; ces modalités sont précisées par décret en Conseil d’Etat, qui détermine également les insignes que doivent porter les personnes mentionnées à l’alinéa précédent.
Toutefois, les représentants de la force publique appelés en vue de dissiper un attroupement peuvent faire directement usage de la force si des violences ou voies de fait sont exercées contre eux ou s’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent. (Code pénal, article 431-3)
Le fait, pour celui qui n’est pas porteur d’une arme, de continuer volontairement à participer à un attroupement après les sommations est puni d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende (Code pénal, article 431-4)
Le fait de participer à un attroupement en étant porteur d’une arme est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende (Code pénal, article 413-5). Il ne s’agit pas uniquement d’armes à feu, mais aussi de couteaux, ou tout autre objet (marteau…) pouvant servir d’arme par destination.
Si la personne armée a continué volontairement à participer à un attroupement après les sommations, la peine est portée à cinq ans d’emprisonnement et à 75000 euros d’amende. (Code pénal, article 431-5)
- Pour la rébellion : Constitue une rébellion le fait d’opposer une résistance violente à une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public agissant, dans l’exercice de ses fonctions, pour l’exécution des lois, des ordres de l’autorité publique, des décisions ou mandats de justice. (Code pénal, article 433-6)
La rébellion est punie de six mois d’emprisonnement et de 7500 euros d’amende.
La rébellion commise en réunion est punie d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende. (Code pénal, article 433-7)
La rébellion armée est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende.
La rébellion armée commise en réunion est punie de sept ans d’emprisonnement et de 100000 euros d’amende (Code pénal, article 433-8)
On l’a vu : l’arsenal répressif ne manque pas et les peines encourues sont sévères.
Mais que vaut cette sévérité « de papier » quand dans les faits, ces peines ne sont pas, ou peu, appliquées ?
Comment espérer une dissuasion par la crainte du risque, quand le risque et nul, ou quasi ?
Vous aurez beau menacer vos enfants d’une privation de sorties et d’argent de poche pendant un mois ; si dans les faits, vous vous contentez toujours d’une simple réprimande ou d’une heure dans la chambre, ils ne tarderont pas à le savoir, et votre autorité parentale n’en sera qu’affaiblie.
En France, il en va des lois comme du zizi de l’impuissant : elles n’entrent pas souvent en vigueur.
Deux solutions dès lors :
- Appliquer la loi existante plus durement qu’actuellement, avec des peines planchers.
- Réduire le maximum de la peine encourue, qui in concreto ne correspond à rien, mais en l’assortissant de la certitude d’une sanction ferme (à ne pas confondre avec « peine de prison ferme » !) impliquant dans tous les cas, un aspect contraignant pour le délinquant. Une admonestation, un rappel à la loi, une peine avec sursis pour un primo-délinquant ? Pourquoi pas, mais assortie obligatoirement d’une mesure de réparation, d’amende, de travail d’intérêt général ou autre mise à l’épreuve, suffisamment contraignante pour faire prendre conscience au mis en cause, de la réalité d’une condamnation, et lui faire passer l’envie de récidiver. Pour les mineurs : sanction des parents (je me suis toujours demandé comment diable des mineurs pouvaient se retrouver dehors à des heures indues, sans que les parents de se préoccupent de savoir où ils se trouvent et avec qui…)
Il y a urgence : notre Justice n’est plus crédible, et n’est dès lors plus respectée.
La crainte doit changer de camp ! Cela avant que l’ensauvagement ne s’enkyste dans notre société et que la situation ne devienne irréversible.
O toi le juge pénal, « résiste, prouve que tu existes ! »