Ne nous Facho pas !
Amis adeptes des propos du coin du comptoir, animateurs de la fachosphère toujours prompts à distiller votre venin bien à l’abri devant vos écrans, je vous salue.
Aujourd’hui dans la série « propos à l’emporte-pièce », nous allons répondre aux interrogations existentielles de quelques uns d’entre vous. Non non ne me remerciez pas, attendez au moins de lire ce qui suit.
Commençons avec Winston, qui nous contacte directement sur Twitter. Sur le thème des récents attentats, Winston interroge: « si un gosse vous demande de quelle religion sont les terroristes djihadistes, que lui répondrez-vous ? »
Je sens derrière votre question une pointe d’ironie, cher Winston. Et aussi comme un soupçon d’idées préconçues. Votre syllogisme serait donc « tous les terroristes djihadistes se réclament de l’Islam- donc tous les musulmans sont des terroristes djihadistes ».
D’ailleurs, vous me semblez expert en ce genre de raccourcis, Winston, si j’en juge par votre phrase descriptive sur Twitter, d’une pensée hautement profonde: « Valls et Hitler se réclament tous deux du socialisme ».
Ce à quoi je vous répondrai que le socialisme d’Hitler était national, comme le front du même nom. Et que je vous invite donc à changer votre présentation de twitto en « Le FN et Hitler se réclament tous deux de la nation ».
Mais pour répondre à votre question, cher Winston: si un gosse ou quiconque (pourquoi spécifiquement un enfant ?) m’interroge sur la religion des terroristes djihadistes, je lui conseillerai de se garder des raccourcis, a fortiori faciles, et de distinguer entre religion revendiquée et réalité. Le Ku Klux Klan se proclame chrétien, est-ce à dire que tous les chrétiens sont des racistes esclavagistes ? Je vous laisse méditer là-dessus, Winston.
Toujours au sujet des terroristes djihadistes, LePèreChoir nous interpelle par un commentaire sous un article du Figaro: « Mais bon sang qu’on les laisse partir en Syrie et qu’ils y restent, cela évitera des drames ».
Le souci, cher LePèreChoir, c’est que ni vous ni moi n’avons la certitude qu’ils « y resteront ». Comprendre: qu’ils mourront. Si tel était le cas, nous les laisserions aller se faire tuer sans état d’âme.
Sauf que. Et s’ils revenaient ? En voulant éviter des drames, vous en causeriez…car laisser partir ces « combattants », c’est prendre le risque qu’ils nous reviennent en boomerang, qu’ils y soient autorisés ou non. Croyez-vous qu’une déchéance de nationalité ou une interdiction définitive de regagner le territoire français les dissuaderait ? Et ils nous reviendront aguerris, entraînés, accros à la mort, le cerveau lavé par on ne sait qui, pour aller commettre ici, on ne sait quoi. Et là je vous entends déjà demander au premier attentat commis par ces « revenants » : « mais bon sang pourquoi les a-t-on laissé partir en Syrie, si on les avait empêchés cela aurait évité des drames ! »
Cyril45 nous « offre » involontairement, une transition entre ce sujet et le suivant. A propos du décès du jeune Adama Traoré et de la demande par sa famille d’une nouvelle autopsie, Cyril45 écrit : « plus une nouvelle marche blanche peut-être, autorisée, elle. Alors que refusée à Nice en hommage aux 84 personnes assassinées ».
Cher Cyril45, comparaison n’est pas raison. Et la jalousie est mauvaise conseillère…surtout quand elle porte de façon déplacée, sur ces deux situations n’ayant rien à voir entre elles.
La famille et les amis d’Adama Traoré ne se voient pas autorisés à effectuer une marche blanche, en raison d’une origine ethnique ou d’une couleur de peau. Et les proches des victimes des attentats de Nice (peut-être d’ailleurs s’en trouve t’-il dans les soutiens à Adama Traoré ?) ne se sont pas vu refuser une telle marche parce qu’elle serait « réservée-aux-immigrés-et-autres-racailles-de-banlieue » pour reprendre le fond de votre pensée. Simplement, dans le premier cas, nous avons un mouvement de protestation suite au décès d’un jeune homme dans des conditions troubles. Dans le second, nous avons une marche qui serait organisée suite à des attentats. Une marche qui pourrait « tenter » quelque fou de Dieu ou fou tout court, d’en « remettre une couche » en portant atteinte à ceux qui commémorent. Une marche qui au vu de ce qui s’est passé lors de la minute de recueillement sur l’esplanade des Anglais de Nice au lendemain du drame, avec prise à partie de familles de victimes de couleur trop « bronzée » au goût de quelques-uns, pourrait donner lieu à semblables débordements. c’est donc en conscience et pour prévenir ces risques, que la préfecture a préféré interdire une telle « marche » et lui substituer un rassemblement commémoratif dans un endroit plus facile à sécuriser et à canaliser qu’une foule en marche dans les rues.
CaiusBonus quant à lui, a la solution pour éviter la nouvelle expertise réclamée par la famille Traoré et son avocat, une solution qu’il qualifie lui-même de « simple »: « on met cet avocat pénible au trou et la famille dans l’avion direction Mali. Sinon ils vont nous faire … jusqu’au bout et avec nos sous. »
Cher CaiusBonus, un avocat pénible qu’on met « au trou », c’est en Turquie ou en Chine que cela se passe. Vous seriez-vous trompé de pays ? Au demeurant, ce que vous appelez pour un avocat, « être pénible », constitue tout simplement pour lui à faire son travail.
Quant à la famille Traoré, pourquoi diable vouloir l’expédier au Mali ? serait-elle en situation irrégulière sur le territoire national ? Certains de ses membres ne seraient-ils pas nés en France et de nationalité française ?
Du reste, par quoi motiveriez-vous cette mesure d’éloignement du territoire national ? En somme, vous puniriez toute une famille (et son avocat !) pour avoir eu l’outrecuidance de simplement, demander une mesure d’expertise, ce à quoi la Loi française l’autorise ? Donc d’avoir voulu exercer ses droits ?
Et en quoi cela vous fait-il (chier ?) « jusqu’au bout », qu’une famille demande de connaître avec précision, les raisons de la mort de son fils ? Surtout quand une bavure policière est soupçonnée ? Cela vous dérange à ce point que la vérité soit recherchée ? Ou craignez-vous ce qu’une contre-expertise pourrait démontrer ?
« avec vos sous »…si les Traoré paient des impôts, c’est aussi avec les leurs. Et rassurez-vous, CaiusBonus: « vos » sous sont toujours bien employés, quand ils servent à connaître la vérité.
Supposons, cher CaiusBonus, je sais pour vous cela semble relever de la science fiction, vous êtes tellement parfait ! et puis les ennuis c’est réservé aux Traoré, n’est-ce-pas… Supposons donc, que votre fils, la chair de votre chair, décède suite à une arrestation. Vous savez, cela arrive à des gens très bien de se faire arrêter…nul besoin d’être un délinquant chevronné ! Prendre le volant après une soirée bien arrosée, peut suffire.
on vous annonce donc, que votre fils est mort.
Sauf à ce que vous disiez « bien fait pour lui, l’avait bien cherché, ce p’tit con », ce dont je doute fort, ou alors il faut vous retirer vos gosses d’urgence, votre réaction première, naturelle, de père, sera de demander pourquoi…oui pourquoi votre fils est mort à vingt ans ?
Et supposez que l’on vous donne des réponses évasives, puis contradictoires: « arrêt cardiaque », puis « étouffement » puis « infection grave de plusieurs organes »…
Ne serez-vous pas tenté de demander une expertise ?
Et si cette autopsie ne révèle aucune trace de coups, d’en demander une seconde pour en avoir le cœur net ?
Et si la seconde comporte des points de divergence avec la première…même si elle arrive aux mêmes conclusions, que ferez-vous, CaiusBonus ?
Direz-vous « je suis un citoyen soucieux de limiter les dépenses publiques; donc je préfère vivre le restant de mes jours dans le doute, je circule, il n’y a rien à voir ? »
Et à ceux qui vous diront « mais vous vous acharnez, avec NOTRE argent en plus, vous n’avez pas honte ? », que leur répondrez vous ?
« C’est mon fils, merde !! »
Pensez-y…
Andemos quant à lui s’indigne : « Une troisième expertise médicale ? Et pourquoi pas une quatrième ? Ces gens-là se croient tout permis. »
Pas une quatrième, non, cher Andemos. Quand deux personnes ne sont pas d’accord entre elles, alors on en cherche une troisième pour les départager. C’est humain !
Non, « ces gens-là », comme vous les appelez avec un mépris sous-jacent, ne se croient pas tout permis. Ils ne font qu’exercer leurs droits, qui sont aussi les vôtres dans pareille situation. Et dont vous useriez tout autant. ne vous en déplaise, il n’y a pas en France, deux catégorie de citoyens: « les bons français » d’un côté et « ces gens-là », de l’autre, qui n’auraient droit que de se taire.
Diwan trouve quant à lui que « la famille de Traoré ne manque vraiment pas d’air. Visiblement, Traoré avait trempé dans une affaire d’extorsion de fonds. A la place de la famille j’aurais été dans mes petits souliers, mais eux, au contraire, ils ont tout cassé. Il faut maintenant les faire payer. »
D’une part, le Traoré qui est mort, c’est Adama, le frère de celui soupçonné d’extorsion de fonds. Son seul tort aura été de tenter de s’interposer à une arrestation. Cela vaut une garde à vue, voire une condamnation correctionnelle pour outrage et rébellion…mais en aucun cas cela ne mérite de terminer à la morgue.
D’autre part, cher Diwan, à vous suivre, la famille entière aurait dû faire « profil bas » et accepter sans rien dire ni protester, l’annonce de la mort d’un fils, d’un frère. « il y a un délinquant dans la famille, alors ne la ramenez pas ! Cela autorise à tout vous faire…et si d’aventure l’un de vous décède pendant l’arrestation, ne dites rien, fermez-là. Bien fait pour vous, famille de délinquants !! »
Enfin cher Diwan, vous accusez la famille Traoré d’avoir « tout cassé » et suggérez qu’en sus des obsèques d’Adama, elle supporte le coût du remboursement des dégradations commises à l’occasion des nuits d’échauffourées qui ont suivi l’annonce de la mort d’Adama.
Je ne pense pas que la famille ait participé à ces actions, ni même les ait encouragées. Il me semble même avoir entendu des appels au calme lancés par les parents d’Adama. pourquoi alors leur faire supporter la responsabilité –et le coût !- de dégradations qui ont été commises par d’autres et non voulues par eux ? Dans ce pays, l’on n’est responsable pénalement que de ses propres actes, et civilement également des actes commis par ses enfants ou encore préposés. Mais de là à présenter aux Traoré la facture des incendies de bagnoles ou des dégradations d’abribus qui ont davantage desservi la cause d’Adama qu’autre chose, je vous trouve particulièrement injuste, et cruel.
Taubiroute, quant à lui, a la solution : « Etant Maliens, on peut peut-être leur suggérer de faire rapatrier le corps de ce pauvre garçon au Mali et de le faire autopsier là-bas ! »
Taubiroute, je sens dans le choix de votre pseudonyme, quelque facétie révélatrice d’une aversion envers Madame Christiane Taubira. Que vous a t’-elle donc fait ? Je veux dire, mis à part d’être une femme, érudite, noire ? Encore que je loue votre bienveillance de ne pas aller comme le firent certains, jusqu’à la comparer à un singe. Non, vous c’est Taubira + Biroute = Taubiroute. Auriez-vous quelque souci avec votre phallus ?
Cher Taubiroute, le droit s’oppose à votre suggestion. Eh oui, que voulez-vous, les étrangers en France ont les mêmes droits que les français sur le sol national, au regard de ce qui nous intéresse ici. Ainsi, ne peut-il être demandé à un étranger, parce qu’étranger, d’aller chercher Justice ailleurs, qui plus est, à ses frais. Adama étant décédé en France, c’est donc à la Justice française de mettre en œuvre tous les moyens pour connaître la vérité sur les causes de son décès.
Taubiroute, celui qui vous écrit a failli périr bêtement, en 2005, sous les balles d’un policier New-Yorkais. Témoin d’une altercation dans une épicerie près de Central Park, mon faible niveau d’anglais, conjugué avec une tendance à la commission de gaffes, m’a fait confondre le voleur avec le gérant du magasin, et tenter de sauver celui qui se faisait agresser…qui s’est révélé être le voleur. Il n’alla pas bien loin, mais je dus mon salut au fait de ne pas être noir, quand je fus braqué par un pandore local et mis à terre.
Je n’ose imaginer que votre « jurisprudence Traoré » ait été appliquée à mes parents: « Madame, Monsieur, votre fils est malencontreusement décédé dans des conditions étranges. Mais comme vous êtes français, si vous voulez autopsier son corps, cassez-vous en France et faites-le chez vous ! »
Bref, Taubiroute, vous le voyez: vous faites fausse route.
Enfin, Sleg Blankes se veut nostalgique: « Mon parrain était policier réserviste. A l’époque, c’est à coups de matraque qu’ils affrontaient les métalos et les mineurs. Aujourd’hui avec de telles méthodes, ils auraient mis les banlieues au pas et à l’ordre… »
Ach, z’était mieux avant ! A la schlague, qu’on les matera, les banlieues ! c’est tout ce qu’ils méritent !
j’étais disposé à vous fournir une réponse construite et argumentée, sur l’état de Droit, et le fait que non, mater les velléités protestataires à coups de matraque, cela ne se fait pas vraiment.
Mais je me suis intéressé à votre pseudonyme, qui me semblait insolite. Sleg Blankes…on dirait du néerlandais…
Google est formidable. j’y ai appris que « Sleg Blankes », c’était de l’Afrikaaner. du temps de l’apartheid, ces mots figuraient sur des panneaux en Afrique du Sud. Il y en avait même partout. Sleg Blankes. Whites Only. Réservé aux blancs.
Du coup, je me suis dit que vous étiez décidément, un grand nostalgique. Et qu’ici dans le présent, nous devions vous renvoyer à votre passé. ce temps béni des policiers matraqueurs d’ouvriers, ce temps béni des colonies, où l’Afrique du Sud était la propriété des blancs, non mais, c’est vrai, merde, quoi.
Sleg Blankes, je ne vous convaincrai pas de l’inanité de vos propos et de votre pseudo. Je laisse cette noble tâche à un juge correctionnel, qui vous apprendra que Sleg Blankes, c’est de l’incitation à la discrimination et à la haine raciales.
Voilà, mes chers amis, c’était « une journée sur le web », avec le concours zélé des Dupont-Lajoie de devant leur écran. En espérant avoir répondu à leurs questions, et en attendant les suivantes, qui ne manqueront pas d’arriver. Faisons-leur confiance !
Bonne soirée !